«J’étais enceinte de presque six mois lorsqu’on a découvert que quelque chose n’allait pas chez mon bébé. S’en est alors suivi tout un processus médical, avant qu’on nous annonce finalement que notre fils, Noé, était atteint d’un grave syndrome polymalformatif. Nous avons alors dû «choisir» d’interrompre la grossesse. Mais ce terme me laisse toujours un goût amer dans la bouche: est- ce vraiment un choix de devoir interrompre la vie de notre bébé, désiré, rêvé et déjà tant aimé, ou alors décider de mener à terme ma grossesse et faire vivre à Noé des souffrances dès sa naissance, sans garantie qu’il puisse y survivre? J’ai été accompagnée par le personnel médical du mieux qu’il a pu, avec sa réalité du moment, son impuissance et sa propre douleur face à ce genre de situation.
Que cela soit par ce dernier, mes proches ou mon entourage, des mots, des paroles, ont été exprimés qui m’ont profondément blessée et m’ont laissée hébétée. Je me suis sentie terriblement seule, vide, avec l’impression de ne pas avoir de place pour m’exprimer, car cela mettait les gens mal à l’aise. Mais moi, je n’avais qu’une envie: parler, raconter la naissance de notre fils, sa beauté, sa douceur.
Durant mon processus de deuil et d’acceptation, j’ai pu comprendre que personne n’avait eu l’intention d’être malveillant, mais que les gens sont bien empruntés dans ce genre de situation, et ne savent pas que dire ou que faire. Dans notre société, la mort est un tabou et bien souvent un aspect de la vie que l’on préfère ignorer, alors la mort d’un bébé… c’est difficile d’appréhender que la naissance n’est pas toujours égale à la vie.
Face à ces constats, j’ai décidé de créer il y a un an et demi l’Association Naîtr’Etoile avec trois autres Mamanges, qui ont elles aussi vécu une IMG (interruption médicale de grossesse). En effet, on a toutes les quatre trouvé qu’il y avait un manque énorme en ce qui concerne le soutien et l’accompagnement au deuil périnatal. Grâce aux dons que nous recevons, Naîtr’Étoile permet d’offrir aux parents qui perdent leur bébé la possibilité d’être écoutés, accompagnés et soutenus de manière adéquate et en toute bienveillance, mais également d’être bien informés au niveau légal. Par le biais d’entretiens personnalisés avec des doulas, ils peuvent déposer leur vécu et entamer un processus de résilience.
Ils ont aussi la possibilité d’être accompagnés lors des différents rendez-vous médicaux, de manière à bénéficier d’un soutien pratique et émotionnel complémentaire au travail du corps médical. Nous avons ainsi déjà entamé une collaboration avec plusieurs hôpitaux romands, afin de proposer un soutien complet aux paranges. C’est un travail commun que nous estimons absolument essentiel, et pour lequel les maternités romandes ont répondu présentes, avec la volonté d’améliorer l’expérience des couples vivant la perte de leur bébé. Nous trouvons également important de proposer aux parents de mettre en place des rituels symboliques, afin de créer le plus de souvenirs possibles avec leur bébé.
De notre côté, Noé a sa place dans la famille. Nous avons un album de photos de lui, fêtons son anniversaire, et je parle toujours de mes trois enfants: Elio et Milan, mes deux garçons de la terre et Noé, mon fils des étoiles.»