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Evasion

Au pays des pépites

La Suisse regorge de trésors méconnus. Tel est le constat de Fabrice Grossenbacher, un ancien conducteur de locomotive qui a recensé dans un ouvrage des idées d’escapades sortant des sentiers battus.

Texte Pierre Wuthrich
Photos Guillaume Mégevand
Date
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Fabrice Grossenbacher devant la tour néogothique de Champel (GE), anciens thermes de Genève. Genève juin 2021

Le parcours de Fabrice Grossenbacher est pour le moins étonnant. Après avoir commencé des études en français et en histoire de l’art à l’université de Genève, le trentenaire choisit de devenir pilote de locomotive, une profession qu’il exercera durant deux ans. Les horaires irréguliers le poussent cependant à chercher une autre activité. Il devient alors maître-nageur durant une saison et, en voyant passer des bateaux depuis la plage de Versoix, il décide de passer son permis de bateau et s’engage comme marin à la Compagnie générale de navigation (CGN) où il travaille en tant que batelier. Son coté passe-partout en fait aussi un vrai caméléon, une qualité qui fera de lui un détective privé idéal… «Ce sont des métiers qu’on rêve de faire quand on est enfant, résume le Genevois. Et puis, j’avais besoin de me prouver que je pouvais être un homme complet, capable de se débrouiller dans n’importe quelle situation.»

Surtout, Fabrice Grossenbacher avoue faire preuve d’une grande curiosité professionnelle, un trait de caractère qui ne s’estompe de loin pas durant ses loisirs. «Quand je travaillais aux CFF, je disposais d’un abonnement général gratuit. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à aller à la découverte du pays, durant mes jours de congé.» Plutôt que de viser les grands sites que peuvent être les chutes du Rhin, Zermatt ou Chillon, le Genevois s’intéresse aux endroits peu ou pas connus, mais qui méritent eux aussi une visite.

Friand de lecture de cartes de géographie, notre homme scrute alors le réseau de voies ferrées à la recherche de gares isolées pour tenter d’aller dénicher ces perles rares. «Je voyageais aussi au hasard, un peu comme un explorateur, et fonctionnait à l’instinct, en prenant en cours de route une correspondance.»

Le résultat de cette quête, qui lui prendra au final une dizaine d’années? L’élaboration d’une liste riche d’une bonne grosse centaine de châteaux, lacs de montagne ou ermitages passés sous les radars du tourisme de masse. Parmi tous ces lieux visités et photographiés par Fabrice Grossenbacher, citons par exemple le parc Weber près de Zurich, qui n’est pas sans rappeler l’œuvre de Gaudi ou celle du facteur Cheval, citons aussi le marché couvert d’Altenrhein (SG), la seule construction en Suisse de Friedensreich Hundertwasser, ou encore la cascade de Foroglio (TI), qui est l’une des plus spectaculaires avec ses 108 m de haut.

Petit à petit naît l’idée d’en faire en livre «afin de partager mes voyages et mes images et de faire converger mes hobbys que sont l’écriture, la photo et le graphisme». C’est désormais chose faite avec un ouvrage* regroupant quarante trésors cachés.

«La sélection s’est plus ou moins faite d’elle-même car j’ai défini quatre thèmes, à savoir la nature, l’architecture, l’histoire et l’eau, et choisi dix escapades par catégories, tout en respectant un équilibre géographique. Chaque canton est ainsi représenté.»

Certaines pépites de ce guide de voyage pas comme les autres seront de vraies découvertes pour le lecteur. D’autres, par contre, risquent d’être déjà connues, notamment de ceux qui y habitent à proximité ou des excursionnistes passionnés. Les textes informatifs accompagnant chaque site apportent en revanche tous un élément nouveau, par exemple une anecdote ou une date que l’on pouvait ignorer. «J’ai fait de nombreuses recherches et rencontré des gens sur place pour écrire ce livre», précise Fabrice Grossenbacher.

Faisant la part belle aux voyages en transports publics, le guide est précieux pour tous ceux qui souhaitent laisser leur voiture au garage. «En Suisse, la plupart des sites sont facilement accessibles en train et en bus. C’est une grande chance». Puis de conclure: «Il est fascinant que la Suisse recèle autant de diversité sur un si petit territoire. En peu de temps, on peut radicalement changer de paysages. Même en partant de Genève, qui est excentrée, il est possible de faire un aller-retour aux Grisons en une journée, avec deux changements de langue. C’est incroyable.» Il ne nous reste donc plus qu’à profiter de cette extraordinaire richesse.

Ses quatre coups de cœur

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Le château de Wyher (LU) est situé dans le nord-ouest du canton de Lucerne. «C’est très inattendu de découvrir une telle bâtisse, dont la première mention remonte à 1304, ainsi en pleine campagne, loin de tout. Il apparaît un peu comme une oasis dans un désert» (photo: DR).

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L'ascenseur du Hammetschwand (NW) a été inauguré en 1905 afin d’offrir une attraction touristique aux hôtes du Bürgenstock Hotel. Sa particularité réside dans le fait qu’une bonne partie du trajet se déroule en extérieur, surplombant le lac des Quatre-Cantons. «La vue panoramique y est à couper le souffle» (photo: DR).

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Le lac de Seealp (AI) ne se laisse découvrir qu’à pied. Mais la randonnée en vaut la peine car c’est une étendue aux eaux cristallines qui attend les marcheurs. «Un vrai décor de carte postale» (photo: DR).

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La chapelle Saint-Benoît est l’œuvre du grand architecte Peter Zumthor, à qui l’on doit aussi les thermes de Vals. Construit en Surselva, dans le hameau de Sogn Benedegt (GR), l’édifice est recouvert d’écaille de bois et son bandeau de fenêtres sous le toit invite à lever le regard vers le Ciel. «Il faut y aller pour apprécier le génie de la simplicité de Peter Zumthor» (photo: DR).

En savoir plus

Fabrice Grossenbacher, «Trésors cachés de la Suisse. 40 lieux fabuleux méconnus», Ed. Favre. En vente sur exlibris.ch. 

Site de Fabrice Grossenbacher: swisstastix.com

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