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Bande dessinée

Eurêka!

Ancien journaliste, Laurent Schafer s’est lancé en autodidacte dans la bande dessinée scientifique. Avec succès. Après «Quantix», un premier tome devenu best-seller et traduit en russe ou en coréen, le Fribourgeois nous explique avec «Infinix» qui vient de sortir l’infini cosmique et quantique.

Texte Pierre Wuthrich
Photos Nicolas Schopfer (illustration Laurent Schafer)
Date
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Observer, comprendre et transmettre en simplifiant sans dénaturer: telle est la mission de Laurent Schafer avec ses bandes dessinées scientifiques accessibles à tous.

Il n’y a pas d’âge pour réaliser ses rêves, même professionnels. Laurent Schafer le prouve magnifiquement, lui qui s’est lancé dans la bande dessinée alors que son cinquantième anniversaire approchait à grands pas. «J’ai toujours dessiné quand j’étais enfant et adolescent, mais je ne pensais pas pouvoir en faire un métier, explique cet ancien journaliste d’Estavayer-le-Lac (FR). Aujourd’hui, je vis un conte de fées et reste émerveillé de ce qu’il m’arrive, moi le petit Suisse qui connaît un succès incroyable dès sa première bande dessinée.»

Et parler de succès n’a rien d’exagéré puisque l’ouvrage s’est vendu à près de 40 000 exemplaires dans la francophonie – même son éditeur n’en croyait pas ses chiffres de comptes – et a été traduit en russe, coréen et espagnol notamment. Ajoutez à cela une thématique, à savoir la physique quantique et la relativité, qui n’est de loin pas grand public, et vous obtiendrez un ovni dans le monde de l’édition.

L’envie de transmettre

«Quand j’ai découvert les lois de la physique quantique, ce fut une ­révélation pour moi. Je pensais qu’il s’agissait de théories lointaines et éthérées. Or, nous baignons tous dans les champs quantiques. C’est notre réalité, notre quotidien», explique Laurent Schafer qui, une fois le choc passé, commence à compulser des dizaines et dizaines d’ouvrages pour en savoir plus sur le sujet. Et bien que non-scientifique – ou peut-être à cause de cela –, il lui vient l’envie de transmettre ce savoir au plus grand nombre. «Pour moi, la bande dessinée est le support idéal pour cela. Elle rend les choses plus légères et peut dédramatiser sans problème la thématique. Enfin, beaucoup d’entre nous ont un cerveau visuel et apprennent mieux avec l’image.» Pas question toutefois de faire un manuel illustré. Il s’agit ici bel et bien de bande dessinée, comprenant une histoire et des personnages, comme vous et moi, qui ont des sentiments et des loisirs. «Ces éléments permettent aux lecteurs de se sentir concernés et de montrer que la science n’est pas qu’une affaire de ­laboratoires et de blouses blanches.» Autre élément important: l’humour, «qui offre une respiration. Sans elle, le tout pourrait être indigeste.»

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Laurent Schafer a toujours dessiné. Aujourd’hui, il vit de sa passion.

C’est en autodidacte que le Fribourgeois s’est lancé dans la réalisation de sa première bande dessinée, qu’il a baptisée Quantix. Durant trois ans, notre homme a réalisé aussi bien le scénario que les dessins, son épouse Ariane l’épaulant pour la colorisation des cases. Même si Laurent Schafer a l’habitude, de par son précédent métier, de passer de l’information aux lecteurs et de rendre concret ce qui peut être abstrait, il s’est entouré d’un comité scientifique pour valider son œuvre, emmené par Claude-Alain Pillet, du Centre de physique théorique de Marseille. «La communauté scientifique voit généralement mon travail d’un bon œil, car je lui offre une passerelle vers le grand public, sans dénaturer le cœur du message.»

Pour le second tome, Infinix, qui vient de sortir, Laurent Schafer a choisi d’explorer l’infini cosmique et l’infini quantique, sous la bienveillante approbation du Vaudois Michel Mayor, prix Nobel de physique en 2019, qui préface la BD. «Réfléchir à la Voie lactée et à l’infini, cela nous oblige à nous placer dans un contexte très différent de notre vie de tous les jours et apporte son lot de questions philosophiques.» Preuve que la science est bien partout, en chacun de nous. 

C’est vite dit

Quelle planète aimeriez-vous être? 

Mars. C’est la planète des milliardaires; elle est très à la mode en ce moment. Cela étant, je ne pense pas que nous pourrons aller y vivre.

 

Quelle est la plus grande découverte scientifique selon vous?

La physique quantique. Cet ensemble de lois a bouleversé notre conception du monde.

 

Quel phénomène scientifique vous fascine?

L’inconstance du temps. Cinq secondes sur une planète peuvent équivaloir à 5000 ans sur une autre.

 

Quelle est la découverte scientifique que vous attendez le plus?

Maîtriser la fusion nucléaire pour pouvoir imiter ce que fait naturellement le soleil. Nous aurions alors une source d’énergie abondante et propre.

 

Avec quel scientifique mort ou vivant aimeriez-vous partager un repas?

Henri Poincaré, un mathématicien austère mais génial qui a notamment découvert, sans en réaliser l’importance, la fameuse équation e = mc2

 

Une devise?

Il faut croire en ses rêves.

 

Et Dieu dans tout ça?

Je ne pense pas qu’il existe un dieu tel que nous pouvons le concevoir. J’imagine plutôt une sorte de matrice d’énergie.

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