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Boulangerie

Écublens, la capitale du croissant

Migros inaugure une nouvelle installation de boulangerie fine sur le site d’Écublens (VD). Un vrai bijou de technologie qui garantit arôme et légèreté à la pâte feuilletée croustillante… pour des croissants qui seront livrés dans toute la Suisse.

Texte Patricia Brambilla
Photos Niels Ackermann
Date
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Si la ligne dédiée aux croissants est entièrement automatisée, la présence ­humaine reste indispensable.

Le fil rouge, c’est le tapis bleu, qui roule sans discontinuer à travers quatre halles et sur deux étages. Il monte, tourne, descend, dans un espace flambant neuf et entièrement climatisé. La nouvelle ligne de production de croissants, sur le site FFBGroup d’Écublens (VD), a de quoi donner le tournis. «L’objectif de cet investissement, c’est d’optimiser la qualité des produits. On a amélioré le processus, tout en assurant la régularité, sans changer la recette. Les nouveaux croissants sont incomparables», lance Laurent Savary, responsable du site Boulangerie régionale de Migros Écublens. Mais avant de goûter la viennoiserie, place à la fabrication!

Le long périple du croissant

Deux immenses pétrins à double manteau, pour garder les ingrédients à la température idéale de 15 °C, ingurgitent jusqu’à 16 tonnes de farine et 6 tonnes de beurre par jour. Nouvelle astuce: pas besoin de renverser les cuves, la pâte malaxée se déverse directement par-dessous pour commencer son voyage sur le tapis roulant.

Un long voyage à travers extrudeuse et laminoirs (rouleau à pâtisserie géant), dont la pâte feuilletée ressort comme une étoffe ondulante et soyeuse, en seize couches. Le nombre parfait pour obtenir une texture moelleuse et aérée ainsi qu’une juste répartition des ingrédients. «Grâce à cette production en continu, le processus est plus rapide et le traitement de la pâte plus doux. Du coup, elle lève beaucoup mieux, ce qui nous a permis de diminuer les quantités de levure. À l’arrivée, on aura la structure du croissant français, mais avec moins de sucre», sourit Urs Kalberer, développeur technologique pour FFB-Group.

L’heure n’est pas encore à la dégustation. La pâte feuilletée doit d’abord filer en chambre de repos, sorte de grand container en inox, «une vraie nouveauté technologique», avec ses huit étages pour 200 m de tapis roulant. C’est là que la pâte se détend, prend le frais pendant deux heures à 7 °C. En sortant, elle est découpée en cinq bandes, puis en petits triangles, qui sont ensuite roulés. La viennoiserie prend forme en passant dans de petits portiques qui lui donnent sa courbure. Il en ressort une escadrille de croissants à la géométrie parfaite, tous bien alignés sur le bleu du tapis roulant.

En chiffres

  • 21 600
    Nombre de croissants produits par heure
  • 518 400
    Nombre de croissants produits par jour
  • 16
    tonnes de farine utilisée chaque jour
  • 6
    tonnes de beurre utilisé chaque jour
  • 815
    mètres de tapis roulant dans la spirale de fermentation

Congélation plus rapide

Mais le parcours n’est pas fini: les douceurs feuilletées montent alors dans une spirale de fermentation, sorte d’étuve, où elles vont doubler de volume, avant d’être refroidies, décorées pour les unes (noisettes, saumure, graines, etc.) ou simplement aspergées d’eau pour les autres. «La vaporisation permet une congélation plus rapide, donc meilleure, avec une formation de cristaux plus petits», souligne Urs Kalberer, qui a optimisé chaque détail de la recette. De la halle frigorifique à –30 °C, les croissants redescendent pour terminer leur parcours en salle d’emballage. Un tunnel photographique repère les anomalies et éjecte les intrus. Seuls ceux qui sont bien calibrés ont le droit de plonger dans les sachets de congélation. Un dernier passage aux rayons X (pour éviter tout corps étranger) et départ en carton pour la centrale des surgelés Migros à Neuendorf (SO). De là, dix wagons et soixante poids lourds réfrigérés embarquent chaque jour toute la marchandise (les croissants ne représentent que 3% des produits surgelés) à destination des Migros de toute la Suisse. Les viennoiseries passent au four sur place dans les magasins.

Ce sont donc 21 600 croissants qui sont débités chaque heure par cette nouvelle ligne de production. Un monstre d’ingénierie, unique en Suisse, qui a nécessité deux ans de chantier et de développements. Le plus gros défi? «Arriver à l’installer dans un emplacement plutôt étroit, ce qui a occasionné de nombreux réaménagements sur le site. Il a fallu aussi former les gens qui y travaillent, leur apprendre la production on-line, alors qu’ils étaient habitués à une technologie vieille de quarante ans», raconte Ivan Stutz, chef de projet fabrication pour FFB-Group, lequel a assuré la mise en place de toute l’installation. Pas une sinécure, mais le résultat le ravit: «Ce qu’un boulanger fait en trois jours, la machine le fait en six heures, avec la même qualité!»

L’humain au centre

Mais si la nouvelle ligne dédiée aux croissants est entièrement automatisée, la présence ­humaine reste centrale. Unequinzaine de collaborateurssont affiliés à cette chaîne de production, qui fonctionne six jours sur sept toute l’année – un jour étant réservé au nettoyage de la grande cellule de congélation. «L’humain est essentiel, c’est lui qui paramètre, ajuste et contrôle toutes les étapes de la fabrication, de la création de la pâte jusqu’au départ en camion. On ne peut pas laisser la machine sans surveillance. Toute interruption a des effets en cascade. S’il y a un problème au départ, on le retrouve à l’arrivée», souligne Laurent Savary. D’autant que, chaque heure, une fournée doit être goûtée, humée, mesurée, histoire de vérifier la qualité constante de la production. Les croissants tests du jour sortent justement du four: ils ont un beau volume, croustillent de ­façon insolente et ­dégagent un arôme beurré. Ils passent en bouche avec la légèreté d’un nuage...

Dès juillet, la ligne tourneraà plein régime, et assurera la production des croissants précuits et surgelés pour toute la Suisse. Si seul le croissant au beurre de 55 grammes et sa version bio sont pour l’instant disponibles dans les grandes surfaces, toute la gamme existante (fourré au chocolat, au Ragusa, à la confiture, de Sils, etc.) sera peu à peu introduite et il pourrait même y avoir quelques surprises. Comme un croissant ­bicolore annoncé pour le début de l’année prochaine…

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